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29 août 2012 3 29 /08 /août /2012 12:17

Arindam Mukherjee Afin de calmer les rumeurs attisant les tensions entre communautés religieuses, New Delhi a procédé au blocage de centaines de sites Internet et de plusieurs comptes Twitter la semaine dernière. Une mesure maladroite et dangereuse, estime le magazine Outlook.

28.08.2012 |  


Dessin de Cost, Belgique

Dessin de Cost, Belgique

Maladroit. Mal fait. Mal géré. Dès le 18 août, le gouvernement a soudain obligé les fournisseurs d'accès à Internet à bloquer jusqu'à 310 sites. La décision était censée endiguer les rumeurs, les messages insultants et les images douteuses qui ont circulé sur la toile et ont attisé les tensions intracommunautaires [depuis les violences qui ont opposé la tribu bodo aux musulmans fin juillet dans cette région et ont causé la mort de 70 personnes]. 

La mesure a finalement déclenché une véritable tempête. Non seulement les internautes indiens hurlent à la censure mais l'Etat donne de nouveau l'impression, sous prétexte d'assurer la sécurité nationale, d'avoir trouvé une occasion de verrouiller la toile.

Après les évènements de ces dernières semaines [manifestations violentes d'intégristes islamistes à Bombay, exode massif de migrants du Nord-Est par peur d'attaques musulmanes], qui ont été alimentés par des SMS menaçants et des images trafiquées [corps torturés, etc.] postées sur certains sites, le gouvernement avait le devoir d'agir. Mais en bloquant plusieurs sites et pages web, blogs, images et comptes Twitter et en limitant à cinq le nombre de SMS par personne et par jour, il n'a pas vraiment apaisé la population. 

Des sources gouvernementales affirment que la liste des sites concernés a été communiquée par les services de renseignement au ministère de l'Intérieur qui a demandé à celui des Télécommunications de faire le nécessaire. "On arrive à un point où tout devient suspect ; ça en devient absurde", confie un membre du gouvernement, manifestement embarrassé.

Censures et anomalies

La liste des sites et contenus bloqués compte plus de cent pages Facebook et plus de 80 vidéos YouTube. La plupart des contenus font références à des questions de violences intercommunautaires mais on recense plusieurs anomalies. Par exemple, nombre des pages web concernées sont des articles et des reportages publiés dans des médias grand public - Tehelka, Times of India, Firstpost, Al Jazeera, ainsi qu'un reportage de Times Now, une galerie de photo du Telegraph (un journal britannique) et un reportage d'ABC, la chaîne de télévision australienne. 

Paradoxalement, les deux pages pakistanaises bloquées exposent en fait les images trafiquées qui servent à répandre la haine. Les comptes Twitter bloqués comprennent ceux de certains journalistes qui sont souvent critiques vis-à-vis de la politique du gouvernement. Le blocage n'a d'ailleurs pas été très efficace - il était souvent possible de trouver d'autres moyens pour accéder aux pages concernées.

L'Inde compte plus de 16 millions de comptes Twitter et près de 50 millions d'utilisateurs Facebook. La décision du gouvernement a provoqué de vives réactions. "Depuis trois ans, depuis les amendements à la loi sur l'informatique [modifiée en 2008 et ratifiée en 2009], le gouvernement n'avait jamais trouvé de raison légitime pour justifier ses atteintes régulières à la liberté d'expression. Les évènements actuels lui en ont donné une", analyse Sunil Abraham, directeur du Centre for Internet and Society, un organisme de recherche de Bangalore. 

Marche arrière

Au soir du 23 août, les réactions ont pris une telle ampleur que le gouvernement est revenu sur certaines décisions. Il a démenti avoir bloqué les comptes Twitter et la limite de SMS par jour et par personne est passée de cinq à vingt. Certains titulaires de compte Twitter figurant sur la liste ont confirmé à Outlook que leur compte était actif. Dans le même temps, Twitter inc. a informé le gouvernement qu'il ne serait pas en mesure de bloquer les comptes visés.

Le débat sur la censure sur Internet fait rage en Inde depuis que le gouvernement tente de contrôler ce média libre devenu un outil efficace pour mobiliser et influencer les masses. L'année dernière, les autorités ont bloqué onze sites et résultats de recherche et adressé à Google plus de 1 400 demandes de blocage ou de suppression de contenu. Si ces décisions sont légales - l'article 19 (2) de la Constitution autorise le gouvernement à appliquer des "restrictions raisonnables" sur les contenus et la loi sur l'informatique lui permet de s'attaquer à tout contenu "douteux" - les experts considèrent cependant que le gouvernement n'a pas suivi la bonne procédure. Selon eux, il n'aurait dû ordonner aux fournisseurs d'accès de ne bloquer les pages qu'en dernier ressort. 

Pour Sachin Pilot, le ministre des Télécommunication et de l'Informatique, "il ne faut pas de censure, quelle que soit sa forme, sur Internet. Ce n'est que quand Internet est utilisé pour propager des rumeurs que le gouvernement doit intervenir". Et d'ajouter que même les sociétés non indiennes doivent être sensibles aux "réalités indiennes". Mais, comme le résume Nikhil Pahwa, du site Medianama : "En fait, la situation empire progressivement. Le gouvernement profite de toutes les occasions pour augmenter le blocage des contenus en ligne"
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